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Critiques Films

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1997

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1996

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1990

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1989  
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1988

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1980  
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1979

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1970

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Les Damnés

1968

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1967

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1960

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1958

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12 avril 2011 2 12 /04 /avril /2011 17:15

Stripes4.jpgA l'époque où Bill Murray n'était pas encore un acteur "sérieux", il oeuvrait comme clown de service des Saturday Night Live américains, avec Ivan Reitman en fidèle réalisateur associé. Après avoir traité les camps de vacances dans Meatballs (en français Arrête de ramer, t'es sur le sable - bien sûr) et les clubs de golf avec Caddyshack (sans Reitman mais avec Ramis, un de ses acolytes), et avant de s'attaquer à la chasse au fantômes dans Ghostbusters [SOS fantômes] - qui reste à ce jour l'une de leurs meilleurs réalisations -, cette fine équipe s'était attaquée à l'armée avec Stripes, qu'on pourrait comparer, pays pour pays, aux Bidasses en folie (1971) de Zidi ou à Mais où est donc passée la septième compagnie? (1973) de Lamoureux. Comparaison sociologique s'entend, parce que pour ce qui est de la qualité, avouons sans ambage que les américains - peut-être sur la base de ces expériences françaises, allez pourquoi pas, plus probablement parce que la guerre du Vietnam aura empêché ou posé des problèmes politiques à ce genre dans les années 70 - y atteignent une maîtrise supérieure, précurseur des Police Academy de la grande époque.

Le film de bidasse suit souvent un schéma prédéterminé et déjà bien balisé, et tout américain soit-il, Stripes n'y fait pas exception.

Une bande de citoyens que rien ne prédestinait à l'armée, sinon le désoeuvrement, le destin ou d'autres paramètres tous plus loufoques les uns que les autres se retrouvent après quelques scènes d'exposition sous la tutelle tyrannique d'un sergent abruti, ici le sergent Hulka (Warren Oates), lui-même aux ordres d'un officier incapable, modèle du fils à papa obséquieux et pantouflard, le capitaine Stillman (John Larroquette) en l'occurrence.

Parmi ces aventuriers des temps modernes, un psychopathe, un noir, un gros, un - voire plusieurs - abrutis, un fumeur de marijuana, et le héros de l'aventure, intelligent mais complètement fumiste, ici John (Bill Murray, qui reprend son personnage-"clown" habituel), sans oublier l'un de ses potes faire-valoir, Russell (on y reconnaît Harold Ramis, réalisateur de Caddyshack)

Stripes1.JPGS'ensuit une période d'entraînement, prétexte à une série de gags éculés - parcours du combattant, flirts avec de jolies soldates (ici, P.J. Soles qu'on aura déjà vue dans Private Benjamin, et Sean Young, la future Rachael de Blade Runner et la Susan de l'excellentissime No Way Out [Sens unique]). L'enchaînement se clôt par la reconnaissance imprévue et inespérée du peloton d'incapables, et plus spécifiquement du fumiste en chef, par la haute hiérarchie. Par l'humiliation du sergent et de l'officier veule au passage.

Enfin, en troisième et dernier volet (le format standard des films de l'époque n'est que d'une centaine de minutes), une mini-épopée donne l'occasion aux apprentis soldats de prouver qu'ils peuvent faire aussi bien que les "vrais".

Bref, la recette est éprouvée, et  son intérêt réside plus dans ses variations et déviations par rapport à un modèle attendu que dans l'exécution d'un plan devenu exercice de style.

Pour Stripes, Ivan Reitman dispose d'atouts le plaçant déjà en position d'aboutir à un résultat au-dessus de la moyenne.

Stripes2.jpgLe principal, c'est bien entendu Murray, au coeur de toutes les scènes. Par sa présence et ses discours loufoques débités sur le ton le plus sérieux, il captive l'audience sur des scènes qu'on pensait jouées d'avance.

Ainsi l'exercice imposé du "discours patriote énoncé par l'imposteur le plus flagrant de la troupe" (Murray évidemment) dépasse-t-il de loin le standard du style. L'intelligence percutante du dialogue, la sincérité de l'acteur prennent à contre-pied le nationalisme le plus attendu, et aboutissent à un discours des plus efficaces parce que désopilant et profondément juste quand il est adressé à cette bande de bras cassés.

Autre atout, les scènes les plus longues. Le film y trouve l'opportunité de se départir du simple enchaînement de sketches et la chance de s'envoler dans des délires salvateurs: scène de bagarre en boîte de nuit, expédition en Tchécoslovaquie (eh oui, à l'époque on est en pleine guerre froide)

Stripes3.jpgEt là, le gant est relevé sans problème. Stripes y trouve la chance de dépasser ses homologues de cent coudées en allant au bout de l'absurdité et de la bêtise des "autorités compétentes", qui reste le meilleur atout pour faire rire.

Bien sûr, l'exercice aura dû passer par les canons du genre, et y aura perdu de sa fougue originelle.

Il faudra attendre Ghostbusters - là pas de standard imposé, le sujet sera trop absurde pour que le public soit déboussolé s'il n'y retrouve pas ses marques - pour voir le problème surmonté, les barrières démontées.

Stripes n'atteint pas ce niveau, mais établit efficacement une base solide qui en fait encore aujourd'hui la référence américaine du film  comique troupier. Une valeur sûre donc, mais à réserver aux soirées qu'on aura voulues sans prise de tête.

 

Note: 12/20

 

 

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10 avril 2011 7 10 /04 /avril /2011 17:05

Samaria.jpg

La prostitution des adolescents est un sujet difficile. Souvent assimilée au trafic d'enfants, elle finit fréquemment traitée sous l'angle du maniaque ou du pédophile, assortie de considérations moralistes ou apitoyantes plus ou moins sincères assises sur des images racoleuses. Ki-duk Kim (Bom yeoreum gaeul gyeoul geurigo bom [Printemps, été, automne, hiver... et printemps])  s'empare de ce thème avec le détachement qui le caractérise dans Samaria, original thriller psychologique aux mille et une facettes, loin de toute idée reçue, loin aussi de tout ce que vous aurez pu voir sur le sujet.

Samaria est structuré en trois parties.

Dans la première, Vasumitra, deux lycéennes, Jae-yeong (Yea-reum Han) et Yeo-jin (Ji-min Kwak), ont un but dans la vie, se rendre en Europe, et donc s'acheter deux billets d'avion. Pour y arriver, elles ont un arrangement original: Jae-yeong se prostitue auprès d'hommes auprès desquels Yeo-jin sert d'intermédiaire, les contactant par internet, téléphone, mettant au point les rendez-vous et surveillant l'endroit où se passe la rencontre.

Les attitudes des deux jeunes filles, par ailleurs les meilleures amies du monde, vis-à-vis de cette "occupation", sont radicalement opposées. Jae-yeong, lumineuse, candide, aime ce qu'elle fait et s'identifie à Vasumitra, prostituée de légende dont les rapports transformaient les clients en bouddhistes modèles. Elle ne voit que la bonté dans l'apport d'affection à ses clients. Yeo-jin, elle, plus sombre, trouve ces hommes répugnants et ne cache pas le dégoût - et probablement la jalousie - qu'ils lui inspirent.

Samaria5.jpgLes rencontres s'enchaînent jusqu'au jour où la police coince Jae-yong qui choisit de se défenestrer avec un visage illuminé, ravi.

Dans la deuxième partie du film (intitulée Samaria), Yeo-jin, livrée à elle-même, décide de revoir tous les clients de Jae-yong et de les rembourser (!) Ce faisant, elle prend la place de Yeo-jin auprès d'eux, une manière de la garder dans ses souvenirs et de découvrir ce qu'elle refusait jusqu'alors, ce don de soi qui était devenu la vie de son amie. Elle évolue ainsi pour se rapprocher mentalement de son amie, et gagne de cette aura de bonheur qui se dégageait d'elle.

Le père de Yo-jin, un policier veuf qui régale chaque jour sa fille d'histoires religieuses - chrétiennes - édifiantes, découvre par hasard ces rencontres, et alors rien ne va plus...

Dans la troisième partie, Sonata, le père et sa fille tente de se retrouver au-delà des drames et de leurs différences.

Samaria3.jpg

Comme on peut le voir, le scénario de Samaria peut être jugé absurde, mais surtout très choquant. Le réalisateur aborde la psychologie de chaque personnage avec un réalisme et une ouverture d'esprit qui condamne dès le départ le politiquement correct: pas d'image d'épinal chez Ki-duk Kim.

Comment présenter un personnage qui considère que se prostituer ou avoir des relations sexuelles est un acte de bonté qui contribue à faire le bien? Car c'est cette logique que suit Jae-yong et que découvre Yeo-jin.

On pourrait interpréter l'histoire comme une tentative de légitimer cette prostitution naïve et pure, il n'en est rien.

Cette façon de voir les choses n'est en effet pas du tout l'optique initiale des clients, pourtant quelquefois émus  par la "grâce" de la samaritaine.

Samaria4.jpgKi-duk Kim élargit considérablement la réflexion grâce à l'introduction du personnage du père, avec lequel arrivent la société avec sa réalité, ses prédateurs, ses jugements sur les autres et sur soi.

L'innocence réelle et contagieuse des adolescentes - qui fait sans doute une grande part de leur charme - est alors placée face aux adultes qui jugent et détruisent par leur regard même. La connaissance fait s'écrouler le jardin d'Eden.

Des scènes particulièrement fortes déclinent l'impact d'une vision objective et insupportable provoquée par le père. Les clients se trouvent alors cruellement mis à nu devant leurs actions dans un monde qui n'est plus l'univers candide où ils rencontraient leur samaritaine, mais celui, implacable, d'une société avec ses normes, sa morale, ses tabous.

Le personnage de ce père pieux et droit n'est pas le moins intéressant quand il se trouve confronté au bafouement de ses valeurs les plus profondes par sa fille. A quoi, à qui doit-il s'en prendre? A elle? A lui? A ses clients? La dernière proposition est bien entendu la plus facile, mais ne l'est-elle pas trop?

Samaria1.jpgQuand à la troisième partie, c'est la cerise sur le gâteau. Elle conclue l'histoire, développe les affres des uns et des autres et tente une difficile et improbable réconciliation familiale dans un final saisissant. Car selon Ki-duk Kim, la difficulté de communication inter-générationnelle, omniprésente en filigrane, est l'une des clés du "problème", qui de ce fait s'annonce comme incontournable.

Samaria2.jpg

Le ton colle à ce que l'on connait maintenant du cinéma coréen. Le réalisateur  n'hésite donc pas devant la violence physique comme mentale et le gore. Par contre, il évite intelligemment (et contrairement à ce que laissent supposer certaines affiches du film) les scènes de sexe qui auraient fait sombrer le film dans le glauque et le racoleur.

La bande-son bien assortie comprend des remakes de musiques occidentales connues, "à l'asiatique".

Tourné en une dizaine de jours (un exploit pour un film de plus de 95 minutes, un miracle pour un film de cette qualité), Samaria est donc un film de plus de Ki-duk Kim à ne pas manquer!

 

Note: 14/20

 

 

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8 avril 2011 5 08 /04 /avril /2011 17:17

Los-Olvidados.jpgUn film peut entrer dans la catégorie des "inoubliables" pour une scène, un instant, un regard. Los olvidados, en moins d'une heure trente, en fournit dix, cent fois l'opportunité. Considéré comme l'un des plus grands - sinon le plus grand - chef-d'oeuvres de Luis Bunuel, il demeure, malgré une volonté affichée de coller à un réalisme social dans l'air du temps, et soixante ans après sa sortie, un concentré d'images, de dialogues et de sons d'où jaillit la poésie et les émotions contradictoires si caractéristiques de ce surdoué de cinéma. Un film passé référence et devant lequel pâlissent sur bien des points d'excellentes oeuvres plus récentes sur le même thème - Pixote ou Citade de Deus [La cité de Dieu] par exemple.

Une banlieue pauvre de Mexico City.

Lorsqu'El Jaibo (Roberto Cobo) s'évade de prison, il retourne aussitôt à sa bande de gamins désoeuvrés avec deux idées en tête: se venger de Julian (Javier Amuezca), celui qui l'a, pense-t-il, dénoncé, et devenir grâce à sa fine équipe un caïd de quartier.

Grâce à sa volonté et à un ascendant certain obtenu par la prison et son âge, il entraîne donc ses petits camarades, dont le jeune Pedro (Alfonso Mejia), sur la piste d'exploits glorieux: dévaliser un cul-de-jatte, détrousser un vieil aveugle... Quand à Julian, un guet-apens improvisé permet à El Jaïbo d'assouvir sa vengeance et de le tuer plus ou moins par erreur avec la complicité involontaire de Pedro.

Les itinéraires d'El Jaibo, Pedro, d'Ojitos ("petits yeux", joué par Mario Ramirez), petit paysan abandonné par son père au marché se poursuivent ainsi sur fond d'une pauvreté criante, de familles désagrégées et d'aventures plus désespérantes les unes que les autres.

Olvidad3.jpeg

La tentation serait forte de présenter Los Olvidados comme un réquisitoire néo-réaliste implacable présentant la pauvreté comme cause de tous les maux de la société humaine - le film est d'ailleurs introduit sur cette idée, qui coïncide parfaitement avec le contexte politique où évoluait le cinéma non-américain des années d'après-guerre, italien notamment.

L'oeuvre va en fait beaucoup plus loin que cette interprétation simpliste de la société grâce à l'inventivité inépuisable de Bunuel, qui déborde rapidement la vision moraliste et politique pour dresser un paysage contrasté, riche en rêves et en images fortes et originales.

La mise en scène, épurée, est rendue propice à un symbolisme dévastateur. Le réalisateur exploite ainsi des associations d'images mentales troublantes pour obtenir une puissance d'impact terriblement efficace, jusque dans la mise en exergue des contradictions internes des acteurs.

Olvidad1.jpg

Les remords et espoirs de Pedro, les pulsions criminelles - et autres - d'El Jaibo, les émotions d'Ojitos comme du reste des personnages, portés par la maîtrise de Bunuel, aboutissent à des scènes plus intenses et mémorables les unes que les autres, par leurs images comme par leurs dialogues.

Chacune d'entre elles mériterait une étude approfondie, mais retenons-en quelques-unes où l'on retrouve certaines obsessions du cinéaste - utilisation d'animaux, érotisme naïf - : l'attaque du cul-de-jatte par la bande de gamins, la superposition d'une séduction d'El Jaibo avec le passage d'une troupe de chiens déguisés, la tentative de détournement de Pedro par un pédophile devant un magasin de bonbons - traitée sans dialogue -, sa jeune soeur qui s'oint les jambes de lait d'ânesse.

Le rêve de Pedro poursuivi par sa conscience, autre exemple devenu cas d'école (voir vidéo plus bas), cumule poésie et violence dans un climat onirique basé sur des ralentis, séquences superposées, sons utilisés en décalage avec les images qui s'y rapportent. Un talent technique qui n'est pas mis à profit gratuitement mais colle le spectateur aux états d'âmes du gamin.

Olvidad2.jpg

Aucun des personnages ne sort indemne de cette aventure. Lâches, avides, voleurs, violents... tous perdent une part d'eux-mêmes, et les victimes aussi peuvent se transformer en bourreaux. Pourtant, la tendresse de Bunuel - et donc du spectateur entraîné - est là, tangible, y compris pour les plus abominables.

La fin arrive comme un aboutissement choquant - même 60 ans plus tard - mais vraisemblable, et complète magistralement le film.

Une autre version de cette fin, commerciale, a été découverte et publiée beaucoup  plus tard mais diminue considérablement l'impact de l'oeuvre originale.

Mieux vaut donc l'ignorer et rester dans la version voulue par Bunuel.

 

Note: 19/20

 

 

 

 

Le rêve de Pedro:

 

 

 

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6 avril 2011 3 06 /04 /avril /2011 17:02

SuckerPunch1.jpgZack Snyder restait jusqu'ici l'homme des remakes et adaptations réussis (Dawn of the Dead [L'armée des morts], Watchmen) ou ratés (300), mais jusqu'ici n'avait pas mis la main à la pâte scénaristique. C'est aujourd'hui chose faite avec sa dernière réalisation, Sucker Punch, mélange original et très travaillé de plusieurs tendances du cinéma pour ados actuel: jeux vidéos, effets spéciaux à outrance, bande dessinée tendance manga, univers fantastiques et clippesques (?), jeunes filles en mini-jupes et bas résille. Bref un melting pot qui a tout pour cliver l'audience en deux camps bien distincts, ceux qui détesteront, et ceux qui adoreront. Ceux qui sont dans la cible, et ceux qui n'y sont pas.

L'introduction part sur les chapeaux de roue, et laisse augurer d'un film prenant et magistral, une oeuvre d'art dans la lignée sombre et gothique des visuels de Tim Burton et de Sin City.

Baby Doll (Emmy Browning) vient de perdre sa mère, et se retrouve pour son malheur avec sa petite soeur sous le contrôle d'un beau-père (Gerard Plunkett) qui ne va pas tarder à leur faire leur affaire. La jeune fille tente de se rebeller, mais l'homme la fait arrêter et interner dans un hôpital psychiatrique où il soudoie le chef des gardes, Blue Jones (Oscar Isaac), qui promet qu' elle sera lobotomisée cinq jours plus tard.

Le passage accroche bien, l'esthétique y est poussée et raffinée, construite comme un clip sur fond d'une lancinante reprise de Sweet Dreams (are made of this) - l'hôpital a d'ailleurs été opportunément baptisé Lennox House -, les personnages sont bien plantés en quelques images efficaces. Si ça continue comme ça, Sucker Punch sera un régal.

Baby a donc cinq jours à vivre dans cet univers glauque avant d'être transformée en légume. Alors elle rêve, elle imagine, et elle tente - songe ou réalité? - de s'échapper.

Sucker4.jpg

Première étape, elle transforme le sinistre hôpital en maison close / cabaret dont Blue est le tenancier et le docteur Gorski (Carla Gugino, remarquée dans Watchmen et Sin City) la mère maquerelle.

Ensuite, ses camarades d'infortune, autres post-adolescentes enfermées qu'elle va convaincre de se joindre à sa tentative d'évasion, deviennent dans son esprit de jeunes prostituées dont les nom de guerre évoquent autant des danseuses de bars à strip-tease que des héroïnes de bandes dessinées et / ou de jeux vidéos: Sweet Pea (Abbie Cornish), sa soeur Rocket (Jena Malone), la brune Blondie (Vanessa Hudgens, la star des High School Musical) et l'asiatique Amber (Jamie Chung)

Sucker2.jpg

Choix de noms judicieux s'il en est, puisque dorénavant et jusqu'au dénouement, pour ce qui est du côté strip-tease, toutes ces jeunes "eye candies" seront affublées de tenues plus ou moins légères propices à tous les fantasmes - la gent masculine ne pourra qu'apprécier - et que côté jeux vidéos, l'intrigue se résumera à recueillir pièce après pièce les cinq objets qui permettront à la petite troupe de s'enfuir de leur prison devenue somptueux claque des années folles.

Récupérer chacun de ces objets, c'est se lancer à chaque fois dans une nouvelle mini-quête avec son univers propre, fantastique et chatoyant, mission dans laquelle s'illustrent les cinq drôles de dames conduites par un mystérieux Charlie, joué par Scott Glenn en l'occurence. Structure bien connue qui s'intégre dans les gènes même des geeks accoutumés à la résolution d'énigmes à la Final Fantasy et consort, et donc dans le b-a ba scénaristique, mais se révèle d'une triste indigence quand elle sert de seul fil conducteur sur 1h30 de film.

Sucker9.jpgBien sûr, on ne peut qu'applaudir aux exploits techniques de la ribambelle d'"artistes digitaux" capables de rendre réels ces mondes fantasmagoriques: zeppelins, biplans, triplans, samouraïs monstrueux aux yeux de feu, cathédrales en ruines, robots, dragons, orques et assimilés... un vrai bestiaire de l'anticipation et de l'héroïc fantasy qui prend vie.

La musique d'accompagnement très rock tranforme heureusement nombre de scènes et de missions en clips sur des reprises d'airs devenus mythiques (outre Sweet Dreams..., on remarquera aussi White Rabbit,  Björk, Queen)

Mais si tous les trucages, cascades, images, bref le côté technique est une grande réussite, celle-ci reste au service d'un scénario dont elle n'arrive pas à combler l'indigence, et finit a contrario par submerger les quelques reliefs qu'on aurait pu y dénicher. Tout ça pour ça?

Sucker5.jpgNon, le prétexte des belles images et du grand spectacle n'interdit pas la profondeur du scénario. Snyder était déjà tombé dans le piège avec  300, il y replonge ici avec une maestria déconcertante.

Dommage.

 

Note: 11/20

 

 

 

Je ne résiste tout de même pas à ajouter les affiches des principaux personnages du film... 

SuckerA.jpg 

SuckerB.jpg

SuckerC.jpg

SuckerD.jpg

 

SuckerE.jpg

 

Autres films de Zack Snyder chroniqués dans ce blog:

Dawn of the Dead (2004)

300  (2007)


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4 avril 2011 1 04 /04 /avril /2011 19:46

EquationOfLoveAndDeath

Le thriller romantique est un genre peu exploré par le cinéma occidental de nos genre. Il fleurit néanmoins en Asie, où il n'est pas rare de voir des films - Chungking Express de Wong Kar-Wai en est un bon exemple - cumulant suspense, mystère et histoire d'un ou de plusieurs amours désespérés. Li Mi de Caixang [The Equation of Love and Death - L'équation de l'amour et de la mort]), venu de Chine, se place dans cette lignée. Troisième réalisation de Cao Baoping*, appuyé sur une solide distribution, il mêle avec force coups du hasard les trajets amoureux de ses personnages et une intrigue policière somme toute assez banale, mais dévoilée avec habileté, morceau par morceau, tout au long du film.

Li Mi (Xun Zhou, actrice de renom international - Xia cai feng [Balzac et la petite tailleuse chinoise] par exemple) est seule depuis quatre ans, depuis que son compagnon Fang Wen (Chao Deng, un des premiers rôles de  Ji jie hao [Héros de guerre/ Assembly]) a disparu sans laisser d'autre trace qu'un flot de lettres aujourd'hui tari. Depuis quatre ans, elle fait donc le taxi à travers la ville en se récitant ses lettres et en montrant à ses clients des photos de Wen, dans l'espoir d'un indice qui lui permettrait sinon de le trouver, au moins d'en avoir quelque nouvelle. Sans succès.

Ses derniers clients sont deux paysans (parmi lesquels Shui-Tian, joué par Baoqiang Wang, remarqué dans Ji Jie Hao, mais aussi dans l'excellent Mang jing [Blind Shaft], où il incarne un personnage simplet dans la même corde que celui-ci) un peu perdus. Ceux-ci sont sur le chemin d'un mystérieux rendez-vous qui se termine mal, et ne trouvent alors pas d'autre solution que d'enlever Li Mi, qui n'y est pour rien, dans l'espoir d'en tirer de l'argent.Equation4.jpg

Dificile d'en dire plus sans diminuer l'attrait du film, sinon que Hanyu Zhang (le capitaine de Ji jie hao) y joue le rôle d'un officier de police.

Autour de Li Mi, qui reste au coeur de l'action, gravitent donc tous les personnages du film sur deux dimensions étroitement entrelacées: leurs relations amoureuses, et l'intrigue policière.

La direction de Cao Baoping, minutieuse, éclaire parfaitement les états d'âme des uns et des autres, et choisit avec pertinence de placer l'aspect romantique au centre des projecteurs, laissant une histoire policière peu originale au final envelopper le tout.

Les images, superbes, sont signées du directeur artistique de Man cheng jin dai juang jin jia [La cité interdite] (le film de 2006)

Equation3.jpgLes acteurs développent un jeu réaliste et émouvant, encore une preuve, s'il en était besoin, que le cinéma chinois "intérieur" actuel a rejoint en qualité les production made in Hong-Kong et ne se réduit plus aux somptueuses cascades et effets spaciaux des films historiques et d'arts martiaux. Il est aujourd'hui en position d'aborder avec succcès les marchés américains et européens.

Le principal défaut - car il y en a un - de Li Mi de caixang réside dans les acrobaties scénaristiques qui rendent l'intrigue dépendante de coïncidences peu plausibles. Cao Baoping aurait pu assumer et exploiter cet axe en faisant du destin une présence magique, voire un personnage à part entière, et en profiter pour "boucler la boucle" de toutes les intrigues (celle de Shui-Tian par exemple), il a choisi de se concentrer sur l'histoire de Li Mi et de laisser certains fils en suspens, ce qui diminue encore la crédibilité du parcours trop net de l'héroïne.

Mais ne soyons pas trop difficile: la qualité de The Equation of Love and Death reste au-dessus de bien des productions européennes actuelles, et séduira les amateurs de la première période des films de Wong Kar-Wai par exemple.

 

* autres films: Absolute Emotion (2001) - en co-réalisation - et Trouble Makers (2006)

 

Note: 13,5/20

 

 


 
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2 avril 2011 6 02 /04 /avril /2011 17:58

DannyTheDog1

Danny était un gentil petit garçon, c'est maintenant un chien méchant. Pourra-t-il regoûter l'innocence? Voilà l'idée originale développée dans Danny the Dog* cuvée 2005 de chez EuropaCorp, la société de production bessonienne. Une tête d'affiche exceptionnelle (Jet Li, Morgan Freeman), une intrigue traitée  dans le style qu'affectionne le réalisateur du grand bleu. Nouveau conte de fée des temps modernes? Mmmouais...

Comme dans la plupart des productions Besson, le scénario - de lui - repose sur une idée choc et originale, un homme élevé, traité et donc devenu terrible chien de combat, au service corps et âme d'un magnat de la pègre.

Jet Li est donc Danny, recueilli petit  garçon et transformé en machine de guerre par son "oncle" Bart (Bob Hoskins) Danny ne pense rien, ne ressent rien. Il vit dans une cage, avec pour seuls compagnons un nounours et un livre d'enfant. Activé seulement quand on lui retire son collier, il devient alors un tueur redoutable qui tape, étrangle, casse, broie les adversaires que Bart lui désigne.

La vie de Dannny aurait pu continuer sur cette lancée s'il n'avait croisé la route de Sam (Morgan Freeman), accordeur de piano aveugle et de sa fille de 18 ans Victoria (Kerry Condon - Rome,  The Last Station -, ici dans le rôle complètement improbable d'une jeune fille de 18 ans - on lui a rajouté des bagues aux dents tellement c'était peu crédible) Une rencontre qui va réveiller les souvenirs enfouis de Danny, et des sentiments peu compatibles avec son existence de chien de combat.

Besson nous avait fait la jolie jeune femme transformée en exécuteur-agent secret (Nikita), la petite fille et le nettoyeur (Leon), voici donc dans cette lignée l'homme-chien de guerre-petit garçon dans sa tête.

Danny1.jpg

Idée donc inédite dans ses détails mais qui rejoint les thèmes apparemment chers à Besson, mènant à la confrontation d'une violence extrême avec un sentimentalisme, une naïveté, une innocence exacerbés.

Le contraste, toujours efficace, est exploité avec les remèdes habituels et clinquants, même si le réalisateur n'est pas Besson mais Louis Leterrier, l'homme des Transporteur et du dernier Clash of the Titans.

Chaque scène est ainsi alimentée de personnages dépourvus de toute ambigüité, et donc de profondeur. Ils sont soit bons soit mauvais. Pas d'entre-deux, même pour le héros, posé en victime quand il plonge dans la violence. Quel intérêt pour des acteurs aussi expérimentés que Morgan Freeman ou Jet Li de se plonger dans des personnages aussi linéaires et simplistes? Mystère.

Danny2

Le symbolisme de la lutte entre paix et violence, bien et mal s'appuie sur des effets qui forcent encore le trait du manichéisme bessonien s'il en était besoin.

Grand-angle récurrent, climat calqué sur les tourments de Danny (tout va bien: il fait beau, tout va mal: c'est l'orage), combats d'une violence extrême: le spectateur a droit à toute la batterie habituelle, techniquement remarquable, utilisée à la perfection, mais manquant cruellement de subtilité. Toute la poésie qui aurait pu sourdre des rapports entre Danny et sa nouvelle famille adoptive sombre dans le gnangnan, écrasée par les gros sabots de la réalisation.

Dommage, le même sujet traité par un Chan-Wook Park ou un Joon-ho Bong aurait pu donner un chef-d'oeuvre.

 

* autre titre du film: Unleashed


Note: 10/20

 


 
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31 mars 2011 4 31 /03 /mars /2011 17:19

VampireCircus.jpg

Amateurs du kitsch et de l'hémoglobine facile, oyez oyez! Après autant de chef-d'oeuvres aussi variés qu'indubitables que La revanche de Frankenstein, Les fiancées de Dracula, Dracula vit toujours à Londres ou Comtesse Dracula et j'en passe, émergeant des brumes de la sombre Albion, la célébrissime et cultissime société Hammer Production vous envoie de l'année 1972 un des derniers "Hammer Horror movies" de son âge d'or, Vampire Circus, ou Le cirque des vampires. L'affiche à elle seule (voir ci-contre) est promesse de suspense, d'horreur, de jeunes filles dénudées et d'une bonne dose de série B. Ah, ces vampires des années 60/70... un vrai retour aux sources. Miam!

Et on démarre sur les chapeaux de roues avec une révolte paysanne contre un vampire suborneur, le comte Mitterhaus (Robert Tayman), à qui Anna Müller (Domini Blythe), la femme dénudée pour l'occasion du maître d'école, amène des petits enfants avant de faire l'amour avec lui. Après une lutte sanglante, le monstre est tué après qu'il ait lancé son anathème sur le village et envoyé Anna - qui aura échappé de peu au lynchage, sauvée par son mari Albert (Laurence Payne) - chercher Emile (Anthony Higgins), un cousin du comte.

Musique menacante, générique (violet)

Quinze ans ont passé, l'histoire du vampire est passée légende, mais ça ne va pas mieux: le village est en quarantaine à cause d'une mystérieuse maladie qui décime la population.

Un cirque non moins mystérieux parvient tout de même à forcer les barrages(?) et à se faire accepter des villageois après un numéro de danse érotico-féline d'une femme peinte en tigre.

VampCirc2.jpg

Hélas pour la population, une grosse surprise les attend (attention): les membres de la troupe sont en fait des vampires et leurs affidés, leur but de venger le comte Mitterhaus.

La vengeance se met en place et les enfants du village commencent à disparaître...

N'y allons pas par quatre chemins, vous l'aurez sans doute compris, Le cirque des vampires vous fera patauger en pleine série B, à l'image des autres productions Hammer.

VampCirc1Les décors sont en carton-pâte - on se croirait quelquefois dans un épisode des Mystères de l'Ouest -, la musique caricaturale et tonitruante.

Les acteurs ne sont en général pas bien convaincants et tombent dans des postures et des grimaces très anti-Actor Studio. Les brushings comme les costumes restent impeccables en toute situation, les attaques vampiriques se préparent par une indispensable pose durant laquelle le spectateur a l'heureuse opportunité de constater que les vampires ont en général une dentition bien plombée.

Les situations elles aussi, même si on croit aux vampires (?), frisent l'absurde quand elles n'y plongent pas carrément à force de raccourcis saisissants ou d'enchaînements logiques douteux - des vampires ont ainsi la bonne idée de poursuivre leurs proies dans une chapelle, où il est tout de même théoriquement possible de trouver pas mal de crucifix. Mais peut-être n'ont-ils pas l'habitude.

VampCirc4.jpg

Reste que ces approximations et autres aberrations, ajoutées à l'atmosphère des personnages caricaturaux et bien typés du cirque et du village, communiquent - volontairement ou non - au résultat un ton artificiel, irréel qui plonge le spectateur dans un monde simpliste et onirique qui est bien celui des romans d'horreur et de la série B.

Le nain fourbe, la femme-tigre, l'homme-fort (ici interprété par David Prowse, plus connu dans la petite histoire pour avoir été le corps de Darth Vader dans les trois premiers Star Wars), la panthère-garou, le couple d'acrobates, le miroir magique sont les personnages d'une réalité tordue et fantasmagorique d'un univers qui pousse par nature au rêve, et qui s'articule donc à la perfection avec le monde de mystère des vampires.

VampCirc3.jpg

La collision de ces deux univers imaginaires aurait pu ne pas fonctionner. C'était par exemple le cas dans la dernière saison de Heroes, où le cirque était associé aux super-héros. Mais ici, cette association stimule l'imagination et de ce fait laisse passer beaucoup de défauts inhérents à l'intrigue et au manque de maîtrise dans sa réalisation en les sublimant, ce qui constitue bien en soi un tour de force. Même si on ne s'attendait pas à grand'chose en-dehors d'une bonne partie de rigolade, on revient de loin.

La fin du film, qui est en soi grotesque, devient par le même procédé cohérente avec l'atmosphère onirique, et passe correctement.

Des charmes de la série B...

On attend donc maintenant le remake qui exploitera la synergie cirque-vampires en utilisant un scénario, des acteurs et des moyens à la hauteur. Vampire Circus était une bonne surprise, mais sa reprise ne pourra être qu'un hit.

 

Note: 11/20

 

 


 
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29 mars 2011 2 29 /03 /mars /2011 15:57

JSA1.jpgDepuis 1953, la Corée est divisée en deux. Un profond déchirement pour beaucoup de coréens, matérialisé par une zone tampon, la DMZ (zone démilitarisée) bien connue pour son no man's land, ses mines, ses haut-parleurs hurleurs de propagande, la tension permanente qui y règne. Au coeur de la DMZ se trouve la JSA ou Joint Security Area, un endroit unique où les troupes des deux camps se trouvent tous les jours au contact - ou plus exactement à quelques mètres les uns des autres. C'est dans ce lieu hautement symbolique que se déroule l'action de Gondong gyeongbi guyeok ou JSA, le film qui fit émerger le maintenant célèbre Chan-Wook Park*. Un long-métrage avec suspense, action, meurtre, politique internationale, et une vraie émotion qu'on retrouve rarement mêlée aux premiers, sinon justement dans les oeuvres de ce cinéaste.

Sophie Jean, jeune officier suisse d'origine coréenne (Yeong-ae Lee) est envoyée en Corée pour mener une enquête sur un incident sanglant qui s'est produit une nuit au coeur de la Joint Security Area, le "pont dont on ne revient pas", un des endroits potentiellement les plus explosifs au monde.

Un soldat et un officier nord-coréens abattus, un sergent nord-coréen blessé à l'épaule (Kang-Ho Song, toujours aussi juste et qu'on a déjà apprécié dans Memories of Murder et  Thirst entre autres), un sergent sud-coréen également blessé (Byung-hun Lee, aujourd'hui également devenu une vedette coréenne de stature internationale, et qu'on retrouvera bientôt dans I Saw the Devil), un revolver et 16 balles tirées pour un chargeur qui peut en contenir 15...

La version officielle veut que cette nuit-là, le sud-coréen se soit fait enlever au Nord et se soit échappé en tuant deux de ses kidnappeurs. Cette histoire ne convainc pas Sophie, qui poursuit donc son enquête dans cette poudrière.

JSA4.jpg

Chan-Wook Park a opté dans ce film pour une construction un peu bancale en commençant par une longue introduction à l'enquête. Le rythme de la première demi-heure pâtit de ce choix comme de la qualité moyenne des scènes tournées en anglais, au point de frôler le ton de la série judiciaro-militaire américaine JAG de temps à autre.

Une musique très "film d'enquête hollywoodien", des acteurs rigides à l'anglais très approximatifs, une action entravée par le cérémonial omniprésent qui s'est mise en place sur les cinquante dernières années pour que cette zone ne se transforme pas en champ de bataille à chaque opportunité d'affrontement... l'ennui s'installe. Peut-être fallait-il cela pour transmettre le cadre inhumain totalement  automatisé de la DMZ, mais le résultat n'est pas probant.

JSA5.jpg

Le film décolle heureusement avec la recréation des évènements sur lesquels porte l'enquête. A mesure que celle-ci progresse, les versions données par les uns et les autres rapprochent le spectateur de la vérité et sont relatées par flashbacks successifs.

Le centre de l'action et de l'intérêt se transfère donc rapidement du suspense autour du dénouement de l'histoire - dont on saisit en fait très rapidement les grandes lignes - à l'évolution des liens entre les différents personnages du drame, où Chan-Wook Park peut donner toute sa mesure.

Joint Security Area dépasse alors le whodunnit classique pour se concentrer sur les émotions bien humaines tissées par les soldats envers et contre toutes leurs consignes. Appuyé sur les interprétations toutes en subtilité des quatre acteurs principaux, sur des images et des paysages magnifiques aussi, le film vire pour le meilleur dans les registres psychologique et, plus exceptionnel chez Park, politique.

JSA2.jpg

Dans cette seconde partie, le réalisateur anime les situations à la perfection en jouant, comme il le fera dans ses futures oeuvres, sur une palette très variée - et éventuellement déconcertante pour un tel sujet - d'émotions: peur, rire, plaisir, angoisse. La maîtrise de la caméra et du tempo - on retrouve par moment les qualités d'association image/musique du générique de Lady Vengeance - est impressionnante.

Côté politique, loin de toute propagande mais sans l'ignorer, traitant les deux camps sans a priori, le cinéaste décrit à travers ses personnages un simple état de fait, la triste situation dans laquelle se trouve son pays. Pas de lavage de cerveau donc, mais un constat à partir duquel le réalisateur pose avec intelligence les questions que les responsables devraient se poser après plus d'un demi-siècle de postures stériles.

Le contexte est plus fort si l'on connaît ou que l'on compatit à l'histoire de la Corée moderne. JSA est certainement encore plus émouvant pour ses habitants, dont les familles ont souvent été déchirées dans cette guerre, et chez qui la réunification reste un sujet très sensible.

Mais même sans avoir à plonger dans les détails du conflit coréen, Chan-Wook Park produit avec JSA un film aussi prenant que pertinent.

La scène finale est une apothéose. Exceptionnelle, à partir d'une simple photo, elle condense en quelques secondes toutes les émotions qui ont traversé le film. Une leçon.

 

* Old Boy,  Sympathy for Mr. Vengeance, Thirst...

 

Note: 15/20

 

 


Autres films de Chan-Wook Park chroniqués dans ce blog:

Bakjwi [Thirst, Ceci est mon sang] (2009) 

Chinjeolhan geumjassi [Lady Vengeance] (2005)

Boksunen naui geot [Sympathy for Mr. Vengeance] (2002)

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27 mars 2011 7 27 /03 /mars /2011 17:48

Incendies.jpgIncendies, c'était jusqu'à il y a quelques mois une pièce du canadien d'origine libanaise Wajdi Mouawad, une tragédie moderne qui a fait depuis 1983 le bonheur de nombre d'afficionados du théâtre qui y ont surtout apprécié le retour épuré de ce genre qui tendait à tomber en désuétude. Aujourd'hui, c'est un film de Denis Villeneuve qui récolte prix sur prix à mesure qu'il défile dans les festivals. Celui-ci tente sur la même intrigue de conjuguer une vision réaliste, voire historique, avec les courants intenses et profonds qui traversent la pièce et ses personnages.

L'intrigue en question s'inspire de l'histoire de Souha Bechara, femme libanaise qui a passé une dizaine d'années en prison au coeur des années de guerre civile au Liban, cadre propice aux récits de drames humains bouleversants dans lesquels les familles se déchirent où le victime peut facilement devenir bourreau et inversement.

Dans le Canada de nos jours, deux jumeaux, un frère - Simon (Maxim Gaudette) - et une soeur - Jeanne (Mélissa Désormeaux-Poulin) -, se trouvent réunis devant un notaire qui leur transmet les étranges dernières volontés de leur mère, Narwal Marwan (Lubna Azabal), récemment décédée. Deux lettres leur sont remises qui ne pourront être ouvertes que lorsqu'ils auront retrouvé leur frère pour Simon, leur père pour Jeanne.

Cette dernière part alors pour ce pays - le Liban, qui n'est pas nommé -, d'où vient sa mère et qu'elle ne connaît pas, tandis que Simon s'enferme dans le refus.

A travers les témoins qu'elle rencontre se dessine le portrait d'un femme courageuse sur lequel le sort s'acharne, dans un pays en proie aux massacres et règlements de compte entre les différentes factions.

Incendies1.jpg

Les flashbacks sur la vie de Narwal alternent avec l'enquête des enfants confrontés à un passé qu'ils tentent d'accepter.

Difficile de ne pas comparer la pièce de Wajdi Mouawad avec le film de Denis Villeneuve.

La vision transmise par l'original était celle d'une tragédie grecque modernisée: une famille frappée par le destin, des hommes unis par des liens forts contrecarrés par des dieux cruels et retors, et pour le côté moderne la vie, le pardon, l'apaisement qui tentent de passer envers et contre tout.

Ici, Villeneuve a choisi de présenter de façon totalement réaliste le parcours de Narwal, et s'ajoute donc à la couleur "tragédie" omniprésente un ton "reportage sur une guerre civile" que le théâtre ne peut transmettre - faute de moyen notamment.

Incendies2.jpg

Mais ce qui pourrait apparaître comme un plus - et il est difficile de reprocher techniquement quoi que ce soit aux scènes filmées - se transforme en handicap pour ce qui est du fond tragique du film.

Tout le côté magique et mystérieux de la tragédie grecque - les Dieux tout-puissants imposant leurs règles en écrasant les individus -, côté qui implique un détachement vis-à-vis de la réalité de la vie de tous les jours est hélas amoindri, gommé par le rendu méticuleux et détaillé des scènes - détails vraisemblables ou non, là n'est pas la question. Pas de symbolisme, de grandiloquence pour transcender les aventures de la famille Marwan, pour transmettre l'inéluctable du destin qui broie les hommes.

Du coup les coïncidences qui passent comme lettre à la poste chez les Atrides comme dans la version théâtrale - sortes de licences poétiques si on voudra, qui veulent que la boucle soit bouclée - deviennent ici artificielles.

Le souffle épique se raccourcit, l'émotion s'en ressent. Et les incendies censés embraser le spectateur ne sont plus que feux de camp.

 

Note: 12,5/20

 

 


 
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25 mars 2011 5 25 /03 /mars /2011 17:15

TheRite.jpgVous vous rappelez certainement The Exorcist [L'exorciste] de William Friedkin, un film qui a fait date et qui reste un hit près de quarante ans plus tard. Un film qui a donc engendré une ribambelle de dérivés et de copies plus ou moins réussies, parmi lesquelles les dernières en date, The Exorcism of Emily Rose et Dominion: Prequel to the Exorcist rien que pour 2005. Alors quoi de neuf cette année du côté du diable? Eh bien c'est The Rite, avec rien moins qu'Anthony Perkins, réalisé par le Mikael Hafström de 1408 [Chambre 1408], un gage donc pour ce qui est des thrillers axés horreur/ fantastique, au moins sur le papier. Un film bourré de références à son modèle qui tente une incursion du côté du réalisme et de la nature de la foi, ce qui l'éloigne du même coup des côtés horrifiques de celui-ci.

The Rite débute d'ailleurs de la même manière que The Exorcist, un écran qui affirme que ce qui va suivre est "inspiré d'une histoire vraie". Evidemment, ça ne veut absolument rien dire, quelle est la part de vérité, quelle est celle d'inspiration, on restera dans le flou jusqu'au bout, mais cette fois, le film part résolument vers un réalisme prometteur, loin de toute diablerie.

Une réflexion sur la vocation de prêtre et la foi s'amorce, appuyée sur le parcours de Michael Novak (Colin O'Donoghue), propulsé séminariste plus par tradition familiale que par inclination personnelle. Un père autoritaire (Rudger Hauer, trop peu à l'écran), une mère disparue trop tôt, un milieu baignant dans la mort - le père est thanatopracteur... Bref peu d'opportunités d'épouissement pour un petit garçon livré à lui-même et à ses questions.

Rite1.jpgMichael est donc sur le point d'abandonner la voie vers la prêtrise quand son supérieur l'envoie à Rome pour une formation sur l'exorcisme.

C'est là, après avoir eu l'occasion d'exprimer ses doutes, qu'il rencontre le père Trevant (Anthony Hopkins), jésuite gallois qui pratique l'exorcisme au quotidien. C'est là aussi que le film change de ton et tente de déraper vers le fantastique avec l'introduction progressive de divers possédés et autres démons - enfin diront ceux qui auront attendu du surnaturel "sérieux" pendant une petite heure sans grand'chose à se mettre sous la dent.

"Tente" de déraper, parce qu'il est difficile de changer de ton avec succès au beau milieu d'un film.

Parti dans une réflexion existentielle pertinente et assumée sur la foi et le doute, The Rite bascule donc néanmoins du drame psychologique vers le thriller démoniaque avec des effets spéciaux de plus en plus affirmés, de plus en plus présents, de plus en plus - osons le mot - hollywoodiens.

Rite2.jpg

Une première possédée (Marta Gastini, transfigurée pour l'occasion), un deuxième possédé, un premier démon... on se bouscule au portillon. Une ravissante journaliste italienne, Angeline (Alice Braga), qui n'aura d'autre fonction dans l'histoire que celle de "témoin-reporter", assiste aux expéditions du duo Novak-Trevant jusqu'à un final un peu trop prévisible.

Alors bien sûr, les interprétations sont bonnes. Anthony Hopkins livre une fois de plus un numéro époustouflant de personnage ambivalent et éclipse la plupart de ses petits camarades.

Rite3.jpgLa qualité technique est également à la hauteur, du début à la fin du film. Les images sont parfaites - les scènes de pluie impressionnantes -, le cadrage impeccable, l'Italie un peu caricaturale mais éternelle.

Mais toutes ces qualités ne suffisent hélas pas au final à hisser The Rite à la hauteur de son original. Et ce n'est pas les clins d'oeil récurrents à celui-ci qui l'y aident.

Film sur la vocation et la foi, ou thriller horrifique? Le générique de fin lancé, on ne sait plus très bien si on est dans la réflexion ou le divertissement pur, dans le rêve ou dans le réel, tant les couleurs ont évolué dans cette intrigue. Un verre à moitié plein pour les fans de l'un comme de l'autre genre.

Pour les autres, ceux qui se laissent porter, le virage entre les passages psychologique et fantastique du film restera très serré. Trop serré pour ne pas sortir de la route.

 

Note: 12/20

 

 


 
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