Les anglais, depuis Conan Doyle et autres Agatha Christie, ont une réputation inégalée pour ce qui est du whodunit ("qui l'a fait"), vous savez, le film ou feuilleton policier dans lequel l'intérêt réside dans l'identité du tueur, révélée dans les toutes dernières minutes, les toutes dernières pages de l'histoire. Quand le whodunit est développé en série, la récurrence procure un autre intérêt à celle-ci, c'est le développement du personnage central de l'enquêteur: Sherlock Holmes, Hercule Poirot, Miss Marple... Avec Wire in the Blood, les british lancent une machine télévisuelle basée sur un profiler modèle - métier en vogue dans le domaine - pour héros: le docteur Hill (Robson Green), psychologiste universitaire à la personnalité complexe et tourmentée. Des criminels redoutables, un enquêteur surprenant mais très efficace: la recette est éprouvée. N'y manquait qu'une femme détective au caractère bien trempé pour obtenir une des meilleures séries policière des années 2000. Ce sera sur les trois premières saisons l'inspecteur Carol Jordan (Hermione Norris)
Le docteur Hill (Robson Green) est donc un psychologue qui travaille en clinique comme à l'université sur l'esprit criminel.
Parallèlement à ces occupations, il aide la police locale dans ses enquêtes quand elle est confrontée à des criminels en série. Et pour ce qui est de ce type de personnage, si l'on en croît la série, et pour le plaisir du téléspectateur, l'Angleterre en fourmille. Des illuminés, des sadiques, des perdus, des traumatisés... les voies pour devenir serial killer y paraissent inépuisables. Mais heureusement pour le royaume, le docteur Hill est là pour décrypter l'âme criminelle. Et donc éclairer les failles de l'âme humaine du ùmême coup.
A partir des indices les plus subtils, il est capable de décrypter à partir des scènes de crimes et des indices les plus glauques le caractère de leur auteur, de détecter les mensonges des meilleurs mythomanes, de renifler le psychopathe à son seul regard. Il lit dans les pensées et dans les âmes.
Son talon d'Achille - que serait-ce s'il n'en possédait pas -: il est pratiquement autiste, incapable d'exprimer des sentiments qu'il éprouve néanmoins, toujours plongé dans la personnalité de son sujet d'étude du moment, en osmose ambigüe avec les criminels.
C'est ici qu'intervient l'inspecteur Jordan (Hermione Norris), qui complète le génie égaré dans sa tour d'ivoire mentale en lui donnant la chance d'expliciter ses fulgurances.
Ingrédient indispensable dans la structure de la série, elle fournit aussi à des intrigues qui se concentrent a priori sur des personnages peu reluisants - et n'hésitent pas à décrire avec forces détails les exploits des maniaques de tous genres - l'occasion de développer au fil des épisodes une relation romantique et coincée. Very british quoi.
L'équilibre entre les personnages reste sur le fil, les intrigues sont très variées, les dialogues intelligents et bien menés, tout cela sur un format d'une heure et demi, plus long donc que la normale. Une chance donnée aux scénaristes et réalisateurs de développer les personnages - récurrents ou non - et les subtilités de chaque histoire en prenant le temps et en créant un vrai style riche en psychologie, loin du film d'action policier.
A mesure que les épisodes s'enchaînent, les recettes s'épuisent inévitablement et deviennent moins originales, les trucs récurrents plus évidents: la haute hiérarchie policière est toujours composée de bureaucrates incapables, la presse toujours à l'affût du scoop, les personnages secondaires toujours cantonnés dans les mêmes postures qui en viennent à friser la caricature, le couple d'enquêteurs toujours personnellement menacé à un certain moment de l'intrigue pour renforcer les enjeux.
Le bateau finit donc par tanguer sur la durée mais ne lasse pas encore, porté par le jeu du couple d'acteurs principaux et la qualité, la profondeur psychologique des scénarios comme des dialogues. Une grande série policière donc.
L'inspecteur Jordan est hélas remplacée à partir de la saison 4, mais c'est une autre histoire...
Note: 15,5/20